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La verve blues du vétéran Bobby Rush

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Bobby Rush naquit, dit-il, le 10 novembre 1933 à Homer en Louisiane. Sa destinée épouse l’histoire afro-américaine au XXè siècle. Contraint de vivre de petits boulots dès sa plus tendre enfance, privé d’une scolarité normale, malmené par la ségrégation raciale, il a résisté en jouant le blues avec ferveur et vigueur pendant des décennies. Il lui faudra attendre son 83è anniversaire pour qu’enfin un prix prestigieux le hisse au rang des grandes figures de L’épopée des Musiques Noires. Il reçoit ce premier Grammy Award en 2017 et, depuis, ne cesse de narrer son aventure humaine. À 90 ans, il est la mémoire du peuple noir.

La verve de ce fringant nonagénaire n’est jamais feinte. Son discours de vérité nous rappelle combien le quotidien des musiciens africains-américains fut autrefois périlleux. Contemporain de B.B King, Muddy Waters, Howlin’ Wolf ou John Lee Hooker, il ne fanfaronne pourtant pas quand ses souvenirs refont surface et le poussent à honorer ses chaperons. Il a conscience d’être l’un des derniers porte-paroles de ces pionniers du blues qui inventaient une forme d’expression fondatrice.

Bobby Rush, au micro de Joe Farmer :

« La culture noire a toujours été rabaissée, et ce, depuis que je suis né. Il a fallu que des musiciens blancs s’en emparent pour que l’on en parle enfin. Le plus drôle c’est qu’aujourd’hui des musiciens noirs essayent de reproduire le style de blues joué par des Blancs qui essayent eux-mêmes d’être Noirs. Cela est ridicule mais c’est ainsi que les choses évoluent. Je me contente donc de porter seul l’authenticité du blues. Mes aînés étaient bien plus talentueux que moi et je sais pourquoi ils n’ont jamais reçu de prix. Tout simplement parce qu’ils étaient Noirs et que la ségrégation raciale sévissait à leur époque. Mon premier Grammy Award ne m’a pas permis de vendre plus de disques. Cela a seulement attiré l’attention du public sur ma petite personne. Je remercie donc les membres de l’académie des Grammy pour cet honneur mais, bien avant d’avoir reçu ces titres honorifiques, j’avais déjà publié de nombreux albums. Cependant, je suis reconnaissant. Une fois encore, ce n’est que lorsque les Blancs se sont emparé de notre patrimoine que les médias s’y sont intéressés. C’est triste à dire mais le blues n’existerait plus aujourd’hui si un type comme Eric Clapton ne l’avait pas popularisé auprès du public blanc. Je n’en veux pas aux artistes blancs. Je veux juste que l’on rappelle constamment d’où vient cette musique et qui furent les pionniers. Redonnons du crédit aux musiciens noirs qui ont inventé le blues. Je le répète, si des musiciens blancs n’avaient pas joué notre musique, on ne parlerait pas de nous aujourd’hui. On nous aurait oubliés. Rendez-vous compte, certains musiciens noirs ne veulent pas jouer le blues comme l’ont fait leurs aînés. Ils imitent le son des musiciens blancs. Eh bien, que vous le vouliez ou non, je suis fier de ce que j’ai fait et de ce que je suis aujourd’hui ! Oui Monsieur ! ».

Bobby Rush est un vétéran du blues intarissable qui a vécu le racisme institutionnalisé aux États-Unis et fut le témoin des grands mouvements de contestation. Dans les années 60, alors que le pasteur Martin Luther King tentait de faire évoluer la société et les consciences, Bobby Rush agissait à son modeste niveau pour accompagner les appels à la tolérance et à l’égalité. « Je me souviens que, durant mes concerts dans le sud, je mettais mon autobus de tournée à disposition des marcheurs pour qu’ils puissent se rendre sans danger dans les bureaux de vote. En 1963, j’ai fait de même à Chicago car les autorités s’étaient arrangées pour qu’aucune voiture appartenant à un Noir ne puisse se garer dans les quartiers réservés aux Blancs. J’ai cherché à contourner cet interdit mais quelqu’un a mis le feu à mon bus. Je suis allé porter plainte au commissariat du coin et l’agent de police m’a carrément jeté dehors. Il m’a traité de nègre et m’a dit de rentrer chez moi. Mon fils était avec moi… Imaginez sa frayeur ! Aujourd’hui, on ne vous crache pas ouvertement à la figure mais on vous dénie votre statut social. C’est aussi brutal psychologiquement. Par exemple, je n’ai toujours pas l’opportunité de me produire où je veux alors qu’un musicien blanc est accueilli avec les honneurs où que ce soit. Les artistes blancs gagnent beaucoup plus d’argent que les artistes noirs. Et je ne fais pas exception à la règle. Il nous reste notre modeste notoriété. Ce n’est pas grand-chose mais c’est déjà ça. L’Amérique a changé mais certaines attitudes sont restées les mêmes ». (Bobby Rush sur RFI)

Désormais auréolé de trois Grammy Awards et de seize Blues Music Awards, Bobby Rush s’autorise à dénoncer certaines injustices même s’il reconnaît humblement que ses mots n’auront que peu d’impact sur l’évolution des mœurs. Il se plaît cependant à imaginer que ses déclarations resteront gravées dans notre mémoire et que le temps fera son œuvre. Son dernier album en date, All my love for you, est une invitation à célébrer l’amour plutôt qu’à nourrir indéfiniment l’esprit guerrier. Qu’il soit entendu !

► Le site de Bobby Rush.

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La verve de ce fringant nonagénaire n’est jamais feinte. Son discours de vérité nous rappelle combien le quotidien des musiciens africains-américains fut autrefois périlleux. Contemporain de B.B King, Muddy Waters, Howlin’ Wolf ou John Lee Hooker, il ne fanfaronne pourtant pas quand ses souvenirs refont surface et le poussent à honorer ses chaperons. Il a conscience d’être l’un des derniers porte-paroles de ces pionniers du blues qui inventaient une forme d’expression fondatrice.

Bobby Rush, au micro de Joe Farmer :

« La culture noire a toujours été rabaissée, et ce, depuis que je suis né. Il a fallu que des musiciens blancs s’en emparent pour que l’on en parle enfin. Le plus drôle c’est qu’aujourd’hui des musiciens noirs essayent de reproduire le style de blues joué par des Blancs qui essayent eux-mêmes d’être Noirs. Cela est ridicule mais c’est ainsi que les choses évoluent. Je me contente donc de porter seul l’authenticité du blues. Mes aînés étaient bien plus talentueux que moi et je sais pourquoi ils n’ont jamais reçu de prix. Tout simplement parce qu’ils étaient Noirs et que la ségrégation raciale sévissait à leur époque. Mon premier Grammy Award ne m’a pas permis de vendre plus de disques. Cela a seulement attiré l’attention du public sur ma petite personne. Je remercie donc les membres de l’académie des Grammy pour cet honneur mais, bien avant d’avoir reçu ces titres honorifiques, j’avais déjà publié de nombreux albums. Cependant, je suis reconnaissant. Une fois encore, ce n’est que lorsque les Blancs se sont emparé de notre patrimoine que les médias s’y sont intéressés. C’est triste à dire mais le blues n’existerait plus aujourd’hui si un type comme Eric Clapton ne l’avait pas popularisé auprès du public blanc. Je n’en veux pas aux artistes blancs. Je veux juste que l’on rappelle constamment d’où vient cette musique et qui furent les pionniers. Redonnons du crédit aux musiciens noirs qui ont inventé le blues. Je le répète, si des musiciens blancs n’avaient pas joué notre musique, on ne parlerait pas de nous aujourd’hui. On nous aurait oubliés. Rendez-vous compte, certains musiciens noirs ne veulent pas jouer le blues comme l’ont fait leurs aînés. Ils imitent le son des musiciens blancs. Eh bien, que vous le vouliez ou non, je suis fier de ce que j’ai fait et de ce que je suis aujourd’hui ! Oui Monsieur ! ».

Bobby Rush est un vétéran du blues intarissable qui a vécu le racisme institutionnalisé aux États-Unis et fut le témoin des grands mouvements de contestation. Dans les années 60, alors que le pasteur Martin Luther King tentait de faire évoluer la société et les consciences, Bobby Rush agissait à son modeste niveau pour accompagner les appels à la tolérance et à l’égalité. « Je me souviens que, durant mes concerts dans le sud, je mettais mon autobus de tournée à disposition des marcheurs pour qu’ils puissent se rendre sans danger dans les bureaux de vote. En 1963, j’ai fait de même à Chicago car les autorités s’étaient arrangées pour qu’aucune voiture appartenant à un Noir ne puisse se garer dans les quartiers réservés aux Blancs. J’ai cherché à contourner cet interdit mais quelqu’un a mis le feu à mon bus. Je suis allé porter plainte au commissariat du coin et l’agent de police m’a carrément jeté dehors. Il m’a traité de nègre et m’a dit de rentrer chez moi. Mon fils était avec moi… Imaginez sa frayeur ! Aujourd’hui, on ne vous crache pas ouvertement à la figure mais on vous dénie votre statut social. C’est aussi brutal psychologiquement. Par exemple, je n’ai toujours pas l’opportunité de me produire où je veux alors qu’un musicien blanc est accueilli avec les honneurs où que ce soit. Les artistes blancs gagnent beaucoup plus d’argent que les artistes noirs. Et je ne fais pas exception à la règle. Il nous reste notre modeste notoriété. Ce n’est pas grand-chose mais c’est déjà ça. L’Amérique a changé mais certaines attitudes sont restées les mêmes ». (Bobby Rush sur RFI)

Désormais auréolé de trois Grammy Awards et de seize Blues Music Awards, Bobby Rush s’autorise à dénoncer certaines injustices même s’il reconnaît humblement que ses mots n’auront que peu d’impact sur l’évolution des mœurs. Il se plaît cependant à imaginer que ses déclarations resteront gravées dans notre mémoire et que le temps fera son œuvre. Son dernier album en date, All my love for you, est une invitation à célébrer l’amour plutôt qu’à nourrir indéfiniment l’esprit guerrier. Qu’il soit entendu !

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